sabato 26 novembre 2011
Pour en finir avec le nationalisme
Les temps où face aux Etats et aux frontières, naissait le rêve de la fraternité de l’humanité entière et que « notre pays » était le monde entier, semblent désormais révolues. Aujourd’hui, face à un monde de changements rapides qui font peur, on assiste à une recrudescence de toutes les formes possibles de nationalismes. Mais comment définir ces formes, comment définir l’essence du nationalisme qui semble entraîner toujours plus de monde ?
Tout nationalisme commence par une exclusion. Pour définir « une nation », il faut établir des critères pour déterminer qui n’en fait pas partie. Ça pourrait être la couleur de peau, l’endroit de naissance, l’identification avec des traditions culturelles, le langage. La nation se définit donc par des choses qui ne dépendent pas de la volonté de chaque individu, même si l’adhésion aux valeurs culturelles de la nation pourrait sembler indiquer le contraire. Dans un monde où personne n’est libre de donner soi-même forme à sa vie et où exprimer son individualité, son unicité, signifie la révolte, les nationalismes prétendent offrir un foyer à ceux qui se sentent perdus, à ceux qui ne s’estiment pas capables ou assez « forts » pour être (et devenir) simplement soi-même.
Mais le nationalisme, en plus du fait qu’il érige des barrières insurmontables entre les hommes (barrières qui ne peuvent mener qu’à l’incompréhension, le mépris, l’exclusion, la guerre et le génocide), réunit des pôles contradictoires et prétend ainsi surmonter les profondes divisions dans la société. Aussi bien le policier que le voleur peuvent adhérer à la même nation, tout comme le riche et le pauvre, l’entrepreneur et le travailleur, le politicien et le sujet. Dans un monde qui est en pleine transformation (ou qui court vers l’abîme, comme disent certains), où les tensions sociales entre ceux d’en haut et ceux d’en bas se font d’avantage sentir au quotidien, où la possibilité d’une explosion sociale menace la stabilité et reconfigure les rapports dans toute la société, dans la politique, dans la gestion des pauvres, ce n’est pas un hasard que de tout côté le nationalisme remonte. Il est identifié par les pouvoirs comme un dénominateur commun qui se révélera bien utile pour canaliser la rage non pas vers les responsables d’un monde pourri, mais vers d’autres pauvres, déshérités, damnés,…
Si le crade nationalisme flamand semble être devenu la force politique principale au nord du pays, soutenu non seulement par la caste dirigeante mais aussi par d’assez larges couches de la population, cette évolution ne saurait pas nous faire oublier qu’il n’y a pas que ça. Le retour en force du nationalisme se montre par exemple aussi maintenant en Libye, où au moins une partie des insurgés s’est mis à chasser ou enfermer les esclaves de Kadhafi (surtout des noirs venus du sud du Sahara). Partout où un drapeau national est hissé, des fils barbelés, des postes-frontières et des camps d’internement apparaissent. C’est inévitable, c’est dans l’essence même de tout nationalisme, même soi-disant « de gauche ».
Et qu’en est-il de l’identification identitaire ici à Bruxelles ? Même si elle ne prend pas la forme politique du nationalisme, le « communautarisme » est fortement ancré dans la population bruxelloise. Les raisons sont pareilles : le refus du monde actuel se retrouve canalisé vers la glorification d’une appartenance à telle ou telle communauté. Mais ces « communautés » ne sont pas opposées à ce monde, elles en font partie et aussi le fondent, tout comme le capitalisme, l’étatisme, le racisme. A l’intérieur de chaque communauté basée sur « la nation », les mêmes mécanismes sont reproduits : exclusion des autres, reproduction immuable des valeurs traditionnelles et opprimantes, réunion de ce qui, dans la perspective d’une transformation libertaire du monde, devrait s’opposer.
Le seul antidote contre le nationalisme et le communautarisme nous semble être de partir de l’appréciation et de l’affirmation de l’unicité de chaque être humain. Ce n’est que quand l’homme décide enfin de se battre pour, et de donner soi-même forme à une vie libre, qu’il comprend que sa « nation », son « peuple », son « drapeau », son « ethnie » n’étaient que des fausses idées et préjugés pour le faire marcher au pas.
Extrait de Hors service n°22
http://journalhorsservice.blogspot.com/
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